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Fête du village Dong Nhan
On a exposé plus haut la fête de Ha Loi, à la mémoire de deux héroines Trung Trac et Trung Nhi, qui s’étaient insurgées en l’an 40 de l’ère chrétienne et avaient chassé les envahisseurs, redonnant l’indépendance au peuple Viêt pendant 3 ans (40-43). Non seulement à Ha Loi, village natal des Deux Soeurs Trung, mais aussi à Dong Nhan (Hanoi), où un temple à la mémoire des Deux Soeurs Trung a été construit, une fête commémorative est célébrée chaque année. A Ha Loi, la fête a lieu le 6e jour du ler mois lunaire, jour de l’insurrection. A Dong Nhan, la fête dure du 4e au 8e jour du 2e mois lunaire. La célébration la plus importante a lieu le 5e jour, jour où les villageois de Dong Nhan repêchèrent les statues de Trung Trac et Trung Nhi. L’ancien village de Dong Nhan se trouve dans la partie centrale de la rue Huong Vien (arrondissement de Hai Ba Trung, Hanoi intramuros).
Histoire de la fête: L’histoire se déroule sous la dynastie des Ly, aux abords du Fleuve Rouge dans le quartier de Bo Cai (devenu plus tard le champ alluvial de Dong Nhan). Un soir, en revenant de la pêche, les pêcheurs amarrèrent leur barque à l'aide d’une perche. La nuit, le vétéran du village fut averti en songe par un génie “Vous avez fixé votre perche au bras de Notre Mère”. Le lendemain, il réunit tous les villageois pour les informer de cette nouvelle. Il envoya un bon plongeur dans les fonds afin de se renseigner. Celui-ci y découvrit deux statues. Les villageois ne purent les sortir de l’eau. Ils implorèrent l’aide du génie qui leur conseilla d’utiliser non pas des cordes, mais des bandes de soie rouge. Ils s’exécutèrent et parvinrent à sortir de l'eau les statues des soeurs Trung Trac et Trung Nhi. Ils construisirent un temple et les installèrent dans le sanctuaire. Depuis lors, une fête est célébrée à la mémoire de cet événement sacré.
Préparatifs de la fête: Avant la Révolution d’août, le village de Dong Nhan comprenait quatre hameaux: Dong (oriental), Doai (occidental), Nam (méridional) et Bac (septentrional). Ils s’occupaient ensemble de l’entretien et de la garde de la maison communale, de la pagode, de la réparation et de l’achat d’objets du culte. Chaque année, le village désigne le hameau responsable du culte du temple, à tour de rôle. Bien que la date officielle de la fête soit le 5e jour du 2e mois lunaire, les préparatifs commencent dès le 15e jour du 12e mois de l’année précédente, jour où les villageois élisent le chef de culte parmi les chefs de famille de bonne réputation. L’élu présente du bétel et de l’alcool et demande l’approbation du génie à l’aide de deux sapèques. S'il est habilité à désigner la fête au premier jour de l’an, il présente des offrandes de riz gluant et de viande au temple.
Les villageois se mettent à préparer la fête et élisent différents comités:
Le comité d’organisation a la responsabilité de préparer et de désigner les participants à la procession pendant le jour férié, à savoir:
- deux garçons vigoureux qui seront vêtus d’une veste rouge bordée de vert et traîneront des éléphants de papier;
- vingt vieilles femmes qui diront des prières et ouvriront la marche;
- vingt garçons qui porteront des bannières multicolores, des parasols, des tambours, des cymbales et des armes de culte. Ils seront vêtus de vestes rouges, de pantalons blancs et de jambières vertes;
- trente-deux autres seront désignés pour porter le palanquin des Deux Soeurs et quatre encore achemineront des palanquins de jarres d’eau. Tous seront vêtus de robes noires, de pantalons blancs ceinturés de rouges;
- un groupe de musiciens qui jouera de la flûte et des instruments traditionnels suivra le cortège.
Le comité de cérémonie est responsable du contrôle des objets de culte et de procession (bannières, éventails, parasols, épées, palanquins, costumes de fête, ceux qui sont abîmés devant être réparés ou remplacés) et de la réception des visiteurs.
Dès 8h du matin, les participants désignés amènent les éléphants, les palanquins, les bannières, les parasols danla cour du temple et organisent solennellement la procession aux sons d’instruments à cordes traditionnels, de tambours, de gongs et de psaumes chantés par des vieilles femmes. Le cortège est suivi par des centaines de villageois, des milliers de citadins. Les habitants des rues par lesquelles passe le cortège disposent des autels sur le trottoir en signe de respect et saluent à distance. Arrivé sur la rive du Fleuve Rouge, le cortège s'arrête et transfère les palanquins sur des barques, ces derniers sont emmenés jusqu’au milieu du fleuve, où l’eau est claire et propre. A l’aide de seaux, on remplit deux jarres de cette eau dont une partie servira à faire des infusions de baumes que deux vieilles veuves vertueuses utiliseront pour laver les statues. Le reste est réservé au culte pour l’année. La procession regagne le temple où commence le culte. Certaines années, une cérémonie supplémentaire en hommage aux Deux Soeurs a lieu. Le culte est alors organisé et rendu uniquement par des femmes. Les hommes n’ont pas le droit d’y participer ni même d’y assister. Quelques fois, après le culte, on procède à la danse rythmique des lanternes à la cadence des tambourins. Cette danse revêt un caractère culturel populaire intéressant. La troupe "de la danse des lanternes" est composée de dix jeunes filles en robe noire avec une ceinture rouge nouée sur le flanc. Les lanternes sont des assiettes entourées de pétales de papier portant une bougie allumée au centre. Les danseuses ont une lanterne dans chaque main. Elles se déplacent en file dans un va-et-vient à la queue leu-leu, en ronde, en lignes alternées et se groupent enfin deux rangées parallèles devant l’autel. Les gestes sont bien rythmés, les bras s’entrecroisent, montent et descendent dans la lueur intermittente des bougies. Elles prennent soin de ne pas les laisser s’éteindre et de ne pas enflammer les pétales de papier. En tête de ce groupe se tient un personnage que le peuple a coutume d’appeler "la fille battant le tambourin étranglé”. Il est joué par un homme déguisé en fille, vêtu d’une robe noire, d’un pantalon blanc, d’un turban. Il porte en écharpe un tambourin et des bandeaux multicolores sur l’épaule. Deux à quatre oriflammes triangulaires sont fixés dans son dos. Cette pseudo-fille s’avance avec des gestes souples et agiles. “Elle” bat des mains sur son tambourin, suivant la cadence “bap bung, bap bung” de la danse.
Le 6 février lunaire: les villageois de Dong Nhan et ceux d’autres villages amis comme Phung Cong, An Duyen (où l'on trouve des temples consacrés aux Deux Soeurs) clôturent la fête par une partie d’échecs personnifiés qui dure jusqu’au soir.